Disparités de genre dans l'attribution des notes en mathématiques et langue de scolarisation. Une analyse multiniveau dans l'enseignement primaire de deux cantons suisses.

Petrucci, Franck and Zanolla, Giovanna (2024) Disparités de genre dans l'attribution des notes en mathématiques et langue de scolarisation. Une analyse multiniveau dans l'enseignement primaire de deux cantons suisses. In: L´évaluation face aux défis de la diversité et de l'inclusion: entre normes et différenciations, 24, 25 et 26 janvier, Braga (Portugal).

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Abstract

L'égalité des chances est une question majeure dans l'agenda politique de nombreux pays (Dunnzlaff et al. 2011) ainsi que l'un des objectifs de l'Agenda 2030 des Nations Unies. Cet objectif ne peut être atteint que grâce à des systèmes éducatifs équitables, car dans nos sociétés de la connaissance, un niveau d'éducation plus élevé est associé à de meilleures opportunités d'emploi, à un risque de chômage plus faible, à une espérance de vie plus longue, à une meilleure santé, à une plus grande implication dans la sphère publique et sociale et à un niveau de bien-être plus élevé (Skrbinjek, 2020). Dans les cohortes récentes, les femmes affichent des taux d'obtention de diplômes tertiaires nettement supérieurs à ceux des hommes dans tous les pays de l'OCDE (DiPrete & Buchmann, 2013) mais une question reste pourtant en suspens : les raisons de leur sous-représentation dans les carrières les plus dynamiques, telles que les sciences, les technologies, l'ingénierie et les mathématiques, qui les prive de nombreuses opportunités (Beede et al. 2011 ; Herbaut & Barone, 2021), et leur surreprésentation dans les professions de santé (Herbaut & Barone, 2021 ; Zanolla, 2023). Les études sur le genre ont toujours attribué ces différences aux disparités en matière de niveau d'éducation (Evans et al., 2020). Alors que les filles ont tendance à obtenir de meilleurs résultats que les garçons en lecture (van Hek et al. 2019), elles se révèlent, en revanche, moins performantes en mathématiques dans la plupart des pays européens (Contini et al. 2017). Le premier de ces deux écarts, qui se manifestent dès l'école primaire, est le plus remarquable (Park et al., 2007). L'importance de la question amène à s'interroger sur les facteurs dont dépendent ces différences. Les réponses sont souvent recherchées dans les stéréotypes de genre ancrés dans les pratiques de socialisation qui tendraient à favoriser un développement plus rapide des compétences numériques et spatiales chez les garçons (Ceci & Williams 2010). On mentionne également les croyances des enseignants sur les inclinaisons « naturelles » des filles et des garçons concernant les parcours scolaires les plus appropriés, qui s'ajoutent aux pressions parentales et sont véhiculées dans les interactions et les évaluations quotidiennes en classe, contribuant ainsi à façonner l'image de soi des élèves et leurs parcours scolaires (Gabay-Egozi, Shavit & Yaish, 2015 ; Heyder et al. , 2017). L'objectif de cette contribution est, plus particulièrement, d'étudier l'effet du genre sur l'attribution des notes en mathématiques et langue de scolarisation. Elle s'appuie, pour ce faire, sur deux cohortes d'élèves fréquentant la dernière année de l'enseignement primaire dans les cantons suisses du Tessin et de Genève (respectivement 2'200 et 4'300 élèves). Le rapprochement systématique de notes délivrées par les enseignants et de résultats à des tests standardisés (les épreuves cantonales) - servant de mesure du niveau « réel » des élèves - permet d'étudier les distorsions de la notation. Grace aux modèles multiniveaux il est possible d'envisager les élèves, les classes et les enseignants comme des sources distinctes de variation des notes. Chacun des modèles mis en oeuvre comporte, en plus des caractéristiques sociodémographiques de l'élève (statut socio-économique, langue maternelle et âge), le résultat obtenu à l'épreuve cantonale dans la discipline étudiée ainsi qu'une indication sur le comportement en classe. Des caractéristiques de l'enseignant (sexe, ancienneté, type de contrat) et de la classe fréquentée (niveau académique moyen) sont également incluses dans la modélisation. Les résultats se révèlent très similaires dans les deux cantons. Les jugements des enseignants sur le niveau des élèves apparaissent globalement assez valides mais des biais subsistent tout de même dans l'attribution des notes. On observe notamment que les filles sont, « toutes choses égales par ailleurs », systématiquement avantagées en langue de scolarisation (italien pour le Tessin ou français pour Genève) et sont, en revanche, soumises à un jugement plus sévère en mathématiques au Tessin. Les analyses permettent également de constater que, considérés séparément les uns des autres, chacun des «biais» de notation mis en évidence a un effet de taille modeste mais le cumul de plusieurs d'entre eux peut avoir un impact important sur la note délivrée par l'enseignant. L'étude présentée est, par ailleurs, le préambule à une recherche qualitative, actuellement en cours au Tessin, dans laquelle on cherche à mieux cerner les conceptions et les critères d'attribution des notes des enseignants du primaire et du secondaire au moyen d'entretiens approfondis. Ces derniers sont également interrogés sur leurs représentations de la réussite scolaire de leurs élèves.

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